"L'homme de Londres" d'Henri Decoin
Après le début de la Seconde Guerre Mondiale, le ton des films changea. Il passa d'un discours fataliste à un discours moralisateur. La présence des figures ouvrières diminua. Mais ici, le protagoniste est un aiguilleur ferroviaire dans le port du Havre. Par contre, les expérimentations cinématographiques continuèrent.
L'histoire est une adaptation du roman homonyme de Georges Simenon. Maloin,aiguilleur dans une gare maritime, est témoin d'un meurtre une nuit de garde. Lors d'un trafic, un homme est jeté à la mer, ainsi qu'une valise emplie de billets. Maloin, au lieu de prévenir la police, décide dde récupérer la valise. Mais la culpabilité le ronge...
L'Homme de Londres est une réussite visuelle : une photographie magnifique de Paul Cotteret, un noir et blanc (beaucoup plus noir que blanc) charbonneux, de belles images (des reflets, ou encore des surcadrages à travers les fenêtres). La recherche sonore, avec les bruits de trains et de bateaux, est intéressante aussi, même si elle est par moment maladroitement envahissante (peut-être un problème de mixage lors de la restauration?). Le poste d'aiguillage est reconstitué avec minutie.
Les dialogues sont fins et pétillants (je n'en attendais pas moins d'Exbrayat), délicieusement déclamés par Suzy Prim ou Jules Berry.
Mais ceux-ci s'insèrent d'autant moins dans le propos moraliste et réactionnaire d'Henri Decoin. Les lourds passages de la Bible récités par la voix off ne cadrent pas avec les dialogues d'Exbrayat. Et la manière dont sont traités les personnages féminins (traités dans tous les sens du terme, car ils sont sans cesse brutalisés verbalement voire injuriés, et sont soit impuissants, soit fourbes, soit les deux) est indigne.